jeudi 31 mars 2016

Qui a dit que Lucie Aubrac était juive ?

Lucie Aubrac aurait été juive ? Je ne sais plus où j’ai lu cette assertion fausse. Ou bien, je l’ai entendue, de la bouche d’une de mes connaissances.

Le mari de Lucie Aubrac, Raymond Samuel, plus connu sous le nom de Raymond Aubrac, était effectivement juif, et c’est sans doute de là que provient le bobard, ou la méprise, la concernant.

Juive par son mari ?

Lucie Bernard est née à Paris, mais ses deux parents étaient originaires de Saône-et-Loire.

Son père, Louis Bernard, était issu d’une famille de cultivateurs de la région de Cluny.

Sa mère, qui s’appelait Louise Vincent, était domestique. Il semblerait qu’elle soit née dans une famille de vignerons, du côté de La Chapelle-de-Guinchay.

Sachant cela, il est déjà difficile d’imaginer que Lucie Aubrac, née Lucie Bernard et dont la mère avait pour nom de jeune fille Vincent, aurait pu être juive ou compter des Juifs parmi ses ascendants proches.

Même s’il existe des Juifs en Bourgogne, même s’il existe des Bernard juifs, et même s’il existe des vignerons juifs.

Par ailleurs, on sait que Lucie Bernard, dans sa jeunesse, a fréquenté une communauté de Quakers avant de devenir communiste, mais il n’apparaît nulle part dans sa biographie – ni dans l’examen de sa sépulture – qu’elle se serait rapprochée du judaïsme d’une manière ou d’une autre.

Raymond Samuel, à l’instar de son épouse, a été incinéré, ce qui constitue un indice parmi d’autres de son éloignement de la tradition juive.

mardi 29 mars 2016

Theodore Roosevelt, son nom et ses origines

Crétins de « conspis », qui colportent la rumeur d’un président Roosevelt juif, Theodore Roosevelt ou bien Franklin D. Roosevelt, selon les cas, ou selon la météo (sans doute les confondent-ils), dont le vrai nom aurait été Rosenberg, ou bien Rosenfeld : on se demande où ils vont chercher cela.

Peut-être leur suffit-il que Theodore Roosevelt ait été le premier président à nommer un représentant de la minorité juive à un poste ministériel aux États-Unis ? Ou bien, qu’il ait porté le même prénom que Herzl ? Allez savoir.

Théodore, version grecque
du prénom hébreu מתתיהו ?

Je termine donc (du moins, provisoirement) ma série des présidents américains avec le vingt-sixième dans l’Histoire, Theodore Roosevelt, à propos de qui la rumeur absurde m’était parvenue il y a longtemps déjà.

Il était le fils de Theodore Roosevelt Senior et de Martha Bulloch. Lui même a nommé son premier fils Theodore. Ici encore nous avons, et de façon répétée, l’exemple d’un fils qui porte le même prénom que son père, ce qui est en contradiction totale avec la tradition juive en la matière.

En outre, on sait que les Roosevelt descendaient d’émigrés hollandais et que Theodore avait été éduqué par ses parents dans la tradition calviniste.

Comme mentionné dans mon article sur FDR, Roosevelt est un nom hollandais et les Roosevelt ont toujours été chrétiens.

Bulloch n’est pas davantage un nom porté par des Juifs, et les Bulloch étaient évidemment des « Gentils » (voir aussi mon article sur Sandra Bullock). Martha Bulloch est enterrée à la chapelle du cimetière de Green-Wood, à Brooklyn.

Pour reprendre la boutade d’Oury Wesoly à propos de Gustave Eiffel, les « conspis » n’auront pas tout perdu : Theodore Roosevelt, à défaut d’être juif, était franc-maçon.

Une théorie à la noix sur Franklin D. Roosevelt

Après Lincoln, Truman et Eisenhower, je poursuis ma série sur les présidents américains que certains désaxés identifient comme juifs. Il me reste à traiter* les deux présidents Roosevelt, Franklin D. Roosevelt et Théodore Roosevelt. J’examine ici le cas du premier.

Les parents de Franklin D. Roosevelt appartenaient à deux vieilles familles patriciennes de New York et certains obsédés croient peut-être que New York est peuplée uniquement de Juifs. Autre raison possible du fantasme, c’est sous la présidence de « FDR » que les États-Unis sont entrés en guerre contre l’Allemagne nazie et les autres pays de l’Axe (à ce propos, voir aussi mon article sur Truman).

La communauté Delano ?

Or, comme je l’ai écrit précédemment (lire la fin de mon article sur Eisenhower), les chances pour un éventuel candidat juif d’être élu président des États-Unis auraient toujours été extrêmement faibles et il est très difficile d’imaginer sérieusement qu’un président américain aurait pu être juif dans la première moitié du XXe siècle (ni avant, ni même après).

Certains déments voient aussi une ressemblance entre les noms Roosevelt et Rosenfeld. Or, Roosevelt est un nom hollandais et les Roosevelt sont effectivement d’origine hollandaise. D’après le père de FDR, la dynastie familiale aurait commencé avec l’émigré Hollandais Nicholas Roosevelt, ancêtre de FDR mais également de Theodore Roosevelt.

Du côté de sa mère, Franklin Delano Roosevelt descendrait de nobles wallons de la Maison de Lannoy, devenus protestants, et notamment de Philippe de La Noye, dont le nom aurait été par la suite altéré et serait devenu Delano.

James Roosevelt, père de Franklin D., avait prénommé son premier fils James (indice supplémentaire de non-judéité). Son père s’appelait Isaac Daniel Roosevelt et sa mère Mary Rebecca Aspinwall. Les grands-parents paternels de Franklin s’appelaient Jacobus Roosevelt III et Catherine Welles. Sa mère, Sara Ann Delano, était la fille de Warren Delano Jr. et ses grands-parents maternels s’appelaient John Aspinwall et Susan Howland. Franklin D. Roosevelt était convaincu de descendre d’une des familles les plus anciennes du Grand-Duché de Luxembourg, les comtes de Delannoy, comme la grand-mère maternelle de Charles de Gaulle, Julia Delannoy.

Il n’y a bien évidemment rien de juif dans les patronymes qui précèdent, mais nos « conspis » fantasment peut-être sur les prénoms Jacobus, Isaac, Rebecca et Sara, en feignant d’ignorer (ou en ignorant vraiment ?) que de tels prénoms d’origine biblique (et donc juive) sont depuis longtemps très courants chez les protestants anglo-saxons.

Un maître qui a eu une influence déterminante sur Franklin Roosevelt est le révérend Endicott Peabody, qui lui a enseigné le devoir chrétien de charité. Les Roosevelt étaient évidemment chrétiens et absolument pas juifs.


* Par la suite, j’ai dû ajouter à ma collection un autre président américain plus récent, Donald Trump !


Sources : Wikipedia

mardi 22 mars 2016

Eisenhower, un président juif ?

Lincoln, Truman et Eisenhower étaient les trois noms cités par un internaute qui affirmait sur Facebook que les États-Unis avaient déjà eu plusieurs présidents juifs.

Je termine donc cette trilogie avec « Ike », et comme je l’ai écrit précédemment, la méprise est probablement liée à la première partie de son nom, « Eisen- » comme dans Eisenberg ou Eisenstein. Sans compter que son nom intermédiaire était David.

Dwight is Dwight...

Certes, Eisenhower est de toute évidence la forme américanisée du patronyme Eisenhauer ou Eisenauer, parfois porté par des Juifs (geneanet.org).

Cependant, la plupart des noms à consonance germanique qui sont portés par des Juifs sont avant tout des noms germaniques, ce qui signifie qu’ils peuvent très bien être portés également par des Allemands, des Autrichiens ou des Alsaciens non juifs.

Parmi les ancêtres recensés de Dwight D. Eisenhower, il y a des Allemands, et en termes de religion, des mennonites, mais aucun Juif.

Sur le site américain Jew or Not Jew, Eisenhower obtient le score 5 sur 15 et ce score se décompose comme suit : 0/5 pour les origines juives, 1/5 pour le rapport au judaïsme, et 4/5 pour le regret qu’il n’ait pas été juif.

En vérité, les États-Unis n’ont encore jamais eu un seul président juif et selon toute vraisemblance, même un fils de Kenyan qui serait musulman et passablement pro-islamiste, par exemple, quitte à truquer un peu son C.V. et à se faire passer pour un chrétien de gauche (radicale) après avoir fréquenté la paroisse d’un pasteur très antisémite, aurait davantage de chances qu’un Juif de se faire élire à la Maison-Blanche.

lundi 21 mars 2016

Truman, pas plus juif que Lincoln

J’avais tout de suite supposé qu’en ce qui concerne Harry S. Truman, la méprise consistant à supposer qu’il était juif était liée à la terminaison en « -man » (voir précédemment). Tout bien considéré, sachant à quel point les auteurs de ce type de racontar peuvent avoir l’esprit tordu, il me faut envisager également une autre cause, et peut-être même une troisième.

Il y a le fait que Truman ait eu une attitude plus interventionniste que ses prédécesseurs, et qu’il ait joué un rôle important dans la victoire des forces alliées sur les puissances de l’Axe. En effet, dans le langage des antisémites conspirationnistes, ce que je viens d’écrire peut se traduire de la façon suivante : « Truman a fait la guerre pour les Juifs ».

True, man !
Il y a aussi le fait que Truman se soit lié d’amitié et se soit un temps associé avec un commerçant juif, Edward Jacobson. Les conseils de Jacobson auraient influencé Truman dans sa décision de reconnaître l’État d’Israël. Or, Truman était déjà connaisseur en matière d’histoire juive et favorable à l’État juif. On sait aussi que face à ses contradicteurs, il allait déclarer fonder ses décisions sur la justice plutôt que sur le pétrole.

Harry S. Truman était le fils de John Anderson Truman et de Martha Ellen Young, épouse Truman. Son grand-père paternel s’appelait Anderson Shipp Truman et son grand-père maternel s’appelait Solomon Young. Truman et Young ne sont pas des patronymes généralement portés par des Juifs. Concernant le prénom Solomon (Salomon en anglais), il ne faut pas oublier que les protestants anglo-saxons donnent volontiers à leurs enfants des prénoms bibliques.

En l’occurrence, les parents de Harry Truman étaient protestants. En témoigne, notamment, le fait qu’ils aient envoyé leur fils à l’école dominicale de l’Église presbytérienne.

Sur le site américain Jew or Not Jew, Truman obtient le score 5 sur 15, et ce score se décompose comme suit : 0/5 pour les origines juives, 1/5 pour le rapport au judaïsme, et 4/5 pour le regret qu’il n’ait pas été juif (soit un point de moins qu’Abraham Lincoln).

Si l’on sait qu’aux États-Unis, la ségrégation des Noirs a duré jusqu’à la fin des années soixante, qu’avant la Seconde Guerre mondiale Henry Ford avait mené une vaste campagne antisémite, et qu’on aurait alors été bien en peine de trouver un seul Juif parmi les professeurs des plus prestigieuses universités américaines, supposer qu’un Juif aurait eu la possibilité d’accéder à la Maison-Blanche en 1945 est déjà très douteux.


Sources : Wikipedia, Jew or Not Jew